Une notification surgit, le cœur s’accélère. L’écho du message n’a pas encore retenti que, déjà, surgit la crainte de n’avoir pas assez fait, de ne pas être à la hauteur, de voir demain s’effriter. En 2023, près de 62 % des jeunes actifs de moins de 30 ans déclarent ressentir une fatigue mentale fréquente. Ce chiffre explose littéralement par rapport à celui relevé il y a deux décennies.
Entre l’injonction de réussite et la soif de sens, le fil sur lequel marchent les moins de 30 ans devient ténu. Les réactions divergent : certains haussent le ton, d’autres se replient. Pour une part grandissante, la limite entre implication et surmenage s’efface sans crier gare.
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Génération Z au travail : un stress inédit ?
La génération la plus stressée ne se contente plus de dissimuler son mal-être : elle l’affirme, le décortique, en fait un prisme pour penser le travail. Les jeunes nés entre 1996 et 2012, désormais regroupés sous la bannière Génération Z, affrontent des niveaux de stress que leurs prédécesseurs n’ont tout simplement jamais connus. Selon une enquête Cigna International Health, 84 % des salariés interrogés se disent stressés ; ce pourcentage s’envole chez les membres de la génération Z.
Plusieurs facteurs distinguent cette génération :
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- Hyperconnexion : la séparation entre vie privée et professionnelle se dissout, la sollicitation ne connaît aucun répit, l’immédiateté règne en maître.
- Parler de santé mentale, sans détour : les plus jeunes abordent ouvertement leurs difficultés psychiques et n’hésitent plus à consulter, bien plus que les Baby Boomers n’auraient osé le faire.
- Résilience moindre face à la pression : d’après de nombreuses études, la Génération Z supporte mal la difficulté, bien moins que la Génération X ou la Génération Silencieuse.
Dans les open spaces, la tension est palpable. Les attentes des employeurs se transforment, sous l’impulsion de salariés qui réclament un soutien psychologique, davantage de flexibilité et une communication sincère. L’expression « génération anxieuse » s’impose, tant le stress au travail façonne désormais la vie professionnelle.
L’écart entre générations se creuse. Là où les Baby Boomers prônaient la discrétion et l’endurance, les acteurs de la génération Z attendent des entreprises qu’elles reconnaissent et prennent en compte les problèmes de santé mentale. Un basculement profond, qui oblige les organisations à revoir de fond en comble leurs méthodes, leur rythme et leurs priorités.
Pourquoi la santé mentale de la génération Z est-elle autant mise à l’épreuve ?
La santé mentale des jeunes de la génération Z vacille sous une accumulation de pressions inédites. Première cohorte à grandir avec les smartphones et les réseaux sociaux omniprésents, elle subit une hyperconnexion permanente. L’exposition continue à l’image, le jeu des comparaisons, le cyberharcèlement nourrissent une anxiété tenace, aggravant les troubles de l’estime de soi et la solitude. Jonathan Haidt, dans « génération anxieuse », souligne ce tournant : la vie sociale se digitalise, la vulnérabilité grandit.
À cela s’ajoute une instabilité économique persistante. Trouver un emploi stable, accéder à un logement abordable, supporter l’inflation : chaque étape devient une épreuve. La pandémie de Covid-19 a renforcé l’isolement social, bouleversé les études, ébranlé les repères. Aujourd’hui, la majorité des jeunes actifs vivent avec la peur tapie au ventre.
Voici les principales causes qui expliquent cette situation :
- Pression scolaire et professionnelle qui ne cesse de croître
- Éco-anxiété devant la crise climatique
- Surprotection parentale dans la vie réelle, abandon dans la sphère numérique
La fragilité psychologique qui en résulte n’a rien d’anecdotique. Eliza Filby, spécialiste des dynamiques générationnelles, observe une jeunesse surinformée mais désarmée face à la complexité du monde et à la brutalité des algorithmes. Les diagnostics s’enchaînent, les lignes des agendas des thérapeutes se remplissent. La génération Z se distingue non seulement par son rapport décomplexé à la santé mentale, mais aussi par son exigence de reconnaissance et de solutions concrètes.
Burn-out, anxiété, pression sociale : quels impacts concrets sur le quotidien professionnel ?
Face au monde du travail, la génération Z pose les mots : elle expose ses fragilités psychiques, là où les générations précédentes préféraient taire ou camoufler. Pourtant, cette libération de la parole ne protège pas de l’épuisement professionnel. Selon Deloitte, 98 % des jeunes actifs interrogés ont déjà ressenti un burn-out ou des signes d’épuisement. Ce stress accru s’exprime par l’absentéisme, des problèmes de concentration et une relation ambiguë au collectif.
Dans les bureaux, l’anxiété infuse les rapports, fragilise l’autorité, met à mal l’engagement. D’après la BBC, 91 % des 18-24 ans déclarent ressentir une angoisse au travail. Les jeunes collaborateurs cherchent du sens, réclament de la souplesse, mais redoutent la chute. Les manifestations sont multiples : fatigue qui colle à la peau, nuits sans sommeil, hypervigilance, isolement progressif, crises de panique à la clé.
Ce climat pèse lourd sur la dynamique et la cohésion des équipes. Les jeunes générations se tournent massivement vers la thérapie (27 % des adultes de la génération Z consultent, selon American Enterprise Institute), attendent un soutien actif de leurs employeurs, des programmes clairs et un dialogue ouvert. La question de la santé mentale s’impose désormais au management, mais aussi à la culture d’entreprise.
Quelques conséquences concrètes s’observent aujourd’hui :
- Augmentation des arrêts maladie pour motif psychologique
- Turn-over plus élevé, fidélisation des jeunes talents compliquée
- Demande croissante de flexibilité et de dispositifs de gestion du stress
L’entreprise devient alors un véritable laboratoire : nouvelles formes d’organisation, formation des managers à la santé mentale, transformation des espaces pour tenter de contenir la vague d’épuisement.
Favoriser le bien-être au travail : pistes d’action et leviers pour agir collectivement
Adopter une vision globale du bien-être au travail s’impose. La génération Z veut des environnements où l’écoute et la flexibilité remplacent les anciennes hiérarchies. Face à des niveaux de stress accrus déclarés par 84 % des salariés (Cigna International Health), les employeurs ne peuvent plus se contenter d’afficher de vagues engagements. Il s’agit de concrétiser des politiques de soutien à la santé mentale : accès facilité à la psychothérapie, sensibilisation aux risques psychosociaux, formation des managers à l’identification des signaux faibles.
Voici quelques leviers à mettre en œuvre au quotidien :
- Horaires flexibles et télétravail pour rééquilibrer vie personnelle et professionnelle
- Espaces de discussion ouverts sur la santé mentale, anonymat garanti pour celles et ceux qui cherchent du soutien
- Actions collectives : ateliers de gestion du stress, mentorat intergénérationnel, groupes de parole
L’adaptation passe par une lecture fine des attentes selon les générations : les baby boomers cultivent la valeur du travail, la génération X a introduit la notion d’équilibre, la génération Y valorise reconnaissance et souplesse. Les plus jeunes, eux, placent la santé mentale au cœur de leurs exigences et consultent plus volontiers. Le véritable levier ? Installer un climat où exprimer son stress ne relève plus du tabou, mais devient le point de départ d’un renouveau collectif.
La gestion collective du stress n’a rien d’un gadget ou d’une affaire individuelle : elle trace le chemin vers une transformation profonde des pratiques, et, peut-être, vers une génération qui saura enfin desserrer l’étau.